VITA SECUNDA 99

CHAPITRE 65

COMMENT IL SE COMPORTAIT AU SORTIR DE LA PRIÈRE.

  1. Au sortir de ces oraisons privées qui faisaient de lui un tout autre homme, il mettait tous ses soins à se comporter comme les autres, ne laissant rien paraître du feu qui le dévorait, de peur que la louange des hommes ne vînt ravir à son âme les trésors qu’il avait gagnés[1].

 Il disait souvent à ses intimes : « Quand un serviteur de Dieu, au cours de sa prière, est visité par le Seigneur, il doit, avant de clore son oraison, lever les yeux au ciel, joindre les mains et dire au Seigneur : « Cette douceur et cette consolation, tu l’as envoyée du ciel à un pécheur et un indigne ; je te la rends et je t’en confie la garde, car je t’ai dérobé ce trésor. » Et encore : « Seigneur, tu peux me sevrer de tes biens en ce monde, mais réserve-les moi pour le monde à venir ! » Et sa prière finie, le serviteur de Dieu doit se conduire aux yeux de tous comme aussi pauvre et aussi pécheur que s’il n’avait reçu aucune grâce nouvelle. On perd quelquefois pour un médiocre avantage un trésor inestimable, amenant ainsi celui qui nous l’avait donné à ne plus se montrer aussi généreux[2] ».

 Le soir, lorsqu’il gagnait son lit, il le faisait assez bruyamment pour que tous sachent bien qu’il était couché ; mais pour prier la nuit, il avait l’art de se lever si discrètement, si furtivement que pas un de ses compagnons ne l’entendait.

Table des chapitres

[1] Cf. 1 C 96

[2] Cf. Adm 22 et 28.

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