CHAPITRE 92
COMMENT TRAITER LE CORPS POUR LUI ENLEVER TOUT PRÉTEXTE A MURMURER.
129. Le saint disait parfois : « Il faut avec discernement pourvoir notre frère le corps de ce dont il a besoin : on l’empêche ainsi d’engendrer la tiédeur et le trouble. Pour qu’il ne prenne pas en dégoût les prières et les veilles, ôtons-lui tout prétexte à murmurer : « Je meurs de faim1, tes exercices de piété sont un fardeau trop lourd pour moi ! » Mais s’il grogne, au contraire, après avoir eu son picotin normal, sachez alors que cette bête paresseuse a surtout besoin de sentir l’éperon, que cet âne buté n’attend que l’aiguillon2. »
Cet enseignement fut le seul auquel notre Père saint n’a pas conformé sa conduite : fouets et privations lui avaient permis de réduire en esclavage son corps, pourtant innocent ; il lui infligeait sans motif toutes sortes de châtiments. L’ardeur de son esprit avait fini par imprégner son corps au point que la soif de Dieu qui brûlait son âme faisait aussi languir sa chair3.
3 Réminiscence de Ps 62 2 « composé par David errant dans le désert ». On a déjà trouvé en 1 C 97 le développement de la même idée.