Thomas de Celano atteste l’authenticité de cet écrit, dont il transcrit même intégralement la phrase initiale (2 C 189). Il est à déplorer que la mélodie en soit perdue.
Peut-être avons-nous ici une sorte de « Compliment à la sainte Vierge », et donc un témoignage de la piété mariale de saint François, s’il faut s’en rapporter au titre que lui donnent deux manuscrits : Des vertus dont fut ornée la Vierge Marie et qui devraient être l’ornement de toute âme sainte.
Hymne à mi-chemin entre prière et poésie, c’est en tout cas une expression de la mentalité « courtoise » bien médiévale. On peut lui assigner quelques attaches avec divers Combats entre Vices et Vertus : celui du poète Prudence, par exemple, si prisé à l’époque, ou celui de saint Bernard de Clairvaux.
Dans plusiers manuscripts, ce texte suit la Salutation à la Vierge Marie, suggérant que pour François, la salutation des vertus découlait de la Vierge Marie.
1 Salut, reine Sagesse, que le Seigneur te garde, avec ta sœur, sainte et pure Simplicité.2 Dame sainte Pauvreté, que le Seigneur te garde, avec ta sœur, sainte Humilité.3 Dame sainte Charité, que le Seigneur te garde, avec ta sœur, sainte Obéissance. |
4 Vous toutes, saintes Vertus, que le Seigneur vous garde,
lui de qui vous procédez et venez.
5 Nul homme en ce monde, si d’abord il ne meurt
ne peut posséder une seule d’entre vous.
6 Qui possède l’une et ne blesse pas les autres,
il les possède toutes.
7 Qui blesse l’une les blesse toutes
et n’en possède aucune.
8 Chacune d’elles met en déroute
les vices et péchés.
9 Sainte Sagesse confond Satan
et toutes ses malices.
10 Pure et sainte Simplicité confond
toute sagesse de ce monde et toute sagesse de la chair.
11 Sainte Pauvreté confond cupidité, avarice,
et les soucis matériels de ce monde.
12 Sainte Humilité confond l’orgueil
et tous les vaniteux de ce monde.
13 Sainte Charité confond toutes les tentations,
qu’elles viennent du diable ou de la chair,
et toutes les craintes égoïstes.
14 Sainte Obéissance confond toute volonté propre
et tout charnel attachement,
et toute charnelle obstination.
15 C’est elle qui tient le corps mortifié
pour qu’il obéisse à l’esprit,
pour qu’il obéisse à son frère.
16 C’est elle qui rend l’homme docile et soumis
à n’importe quel homme de ce monde,
17 et non seulement aux hommes,
mais aux bêtes et aux fauves eux-mêmes,
18 les laissant disposer de lui comme ils le veulent,
autant que d’en-haut leur permet le Seigneur.
Traduction Damien Vorreux 1996
Les Éditions Franciscaines de Paris autorisent l’École Franciscaine de Paris à reproduire intégralement les Écrits de François et de Claire, moyennant le rappel du Copyright. |
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Copyright : Éditions Franciscaines, Paris, Les Écrits de S. François et de Ste Claire (1996) |
Texte latin original :
Ave, regina sapientia, Dominus te salvet2 cum tua sorore sancta pura simplicitate. Domina sancta paupertas, Dominus te salvet cum tua sorore sancta humilitate. Domina sancta caritas, Dominus te salvet cum tua sorore sancta obedientia. Sanctissimae virtutes, omnes vos salvet Dominus, a quo venitis et proceditis. Nullus homo est penitus in toto mundo, qui unam ex vobis possit habere, nisi prius moriatur. Qui unam habet et alias non offendit, omnes habet. Et qui unam offendit, nullam habet et omnes offendit (cfr. Jac 2, 10). Et unaquaque confundit vitia et peccata. Sancta sapientia confundit satan et omnes malitias eius. Pura sancta simplicitas confundit omnem sapientiam huius mundi (cfr. 1 Cor 2, 6) et sapientiam corporis 7. Sancta paupertas confundit cupiditatem et avaritiam et curas huius saeculi. Sancta humilitas confundit superbiam et omnes homines, qui sunt in mundo, similiter et omnia, quae in mundo sunt. Sancta caritas confundit omnes diabolicas et carnales tentationes et omnes carnales timores (cfr. 1 Joa 4, 18). Sancta obedientia confundit omnes corporales et carnales voluntates et habet mortificatum corpus suum ad obedientiam spiritus et ad obedientiam fratris sui et est subditus et suppositus omnibus hominibus, qui sunt in mundo, et non tantum solis hominibus, sed etiam omnibus bestiis et feris, ut possint facere de eo, quicquid voluerint, quantum fuerit eis datum desuper a Domino (cfr. Joa 19, 11).