VITA SECUNDA 41

CHAPITRE 12

 

COMMENT IL GUÉRIT UN CLERC MAIS LUI PRÉDIT UNE RECHUTE PLUS GRAVE ENCORE A CAUSE DE SES PÉCHÉS.

  1. Au temps où le Père, malade, était hospitalisé à l’évêché de Rieti, on lui amena couché aussi sur un lit, malade et souffrant de partout, un chanoine nommé Gédéon, très sensuel et mondain.

Il s’était donc fait transporter jusqu’auprès du saint et il lui demanda en pleurant de tracer sur lui le signe de la croix. « Mais, lui dit le saint, comment te marquer de la croix, alors que tu as toujours suivi les désirs de ta chair sans craindre le jugement de Dieu ? Je vais te signer au nom du Christ, mais sache qu’il t’arrivera bien pis si tu retournes à ton vomissement après avoir été guéri, car le péché d’ingratitude vaut toujours à ceux qui le commettent un état pire que le premier. » Il traça donc sur lui le signe de la croix, et notre homme qui gisait perclus se releva gaillard, éclatant de louanges. « Je suis sauvé » ! s’écriait-il. Beaucoup entendirent craquer ses vertèbres avec le bruit du bois sec qu’on casse entre ses mains.

Mais au bout de quelque temps il oublia Dieu et livra de nouveau son corps à l’impudicité[1] … et un soir qu’il avait dîné chez un autre chanoine, son confrère, et qu’il y était resté pour la nuit, la toiture s’écroula sur tous les habitants de la maison. Les autres échappèrent à la mort ; le misérable seul fut pris par elle et périt.

Il ne faut pas s’étonner de voir que, selon la prédiction du saint, le dernier châtiment de cet homme fut pire que le premier, car nous devons toujours nous montrer reconnaissants pour les bienfaits reçus, et une rechute dans le crime est une double offense.

Table des chapitres

 

[1] Il y a un proverbe italien qui dit: Passato il pericolo, gabbato il santo; le danger passé, on se moque du saint. C’est en 1236 que cesse de paraître dans les documents le nom du chanoine Gédéon. Il avait été d’abord économe de la cathédrale de Rieti en 1213-1216, puis procureur de l’évêque.

 

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