VITA SECUNDA 61

CHAPITRE 31

 

LE DÉJEUNER DU JOUR DE PAQUES A GRECCIO ET COMMENT, A L’EXEMPLE DU CHRIST, LE SAINT SE PRÉSENTA COMME UN PÈLERIN.

 

  1. Un certain jour de Pâques[1], les frères de l’ermitage de Greccio avaient dressé la table avec plus d’apprêts que de coutume : il y avait des serviettes et des verres. Le Père, descendant de sa cellule, vit la table somptueusement garnie et décorée, mais ce spectacle riant l’attrista. En cachette et sur la pointe des pieds il se retira, se coiffa du chapeau d’un pauvre qui, se trouvait là présent, se munit d’un bâton et sortit. Debout, près de la porte, il attendit que les frères se fussent mis à table : on n’avait pas l’habitude de l’attendre s’il ne se rendait pas au signal donné.

Ils venaient de commencer, quand ce pauvre authentique se mit à crier de la porte : « Pour l’amour du Seigneur Dieu, faites l’aumône à un pèlerin pauvre et malade ! – Entre donc, brave homme, lui répondent les frères, pour l’amour de celui que tu as invoqué ! » Il entra aussitôt et se présenta aux frères attablés : Quelle stupeur pour ces bourgeois[2] à l’arrivée de ce pèlerin ! Sur sa demande, on lui donna une écuelle : il s’assit par terre dans un coin et posa l’écuelle sur le sol. « Maintenant, dit-il, je suis assis comme un vrai frère mineur[3] ! » Et se tournant vers les frères : « Nous devons, plus que les autres religieux, nous sentir tenus d’imiter les exemples de pauvreté que nous a donnés le Fils de Dieu. Cette table garnie et décorée, je l’ai jugée indigne de pauvres qui s’en vont mendiant de porte en porte. »

La suite de l’histoire montre combien François fut semblable à cet autre pèlerin resté seul à Jérusalem, en ce même jour de Pâques, car ses paroles enflammèrent le coeur de ses disciples[4].

Table des chapitres

[1] Pour LP 32, il s’agit de Noël. Mgr A. Terzi observe qu’autrefois Noël était appelé aussi Pascha Nativitatis, d’où la possibilité de confusion.

[2] Civibus : l’antithèse entre le voyageur et ses frères fixés, assis, installés, s’inspire de He 13 14 : Nous n’avons pas ici-bas de cité permanente, mais nous tendons vers celle qui est à venir.

[3] On sait, par LP 30, qu’à la Portioncule, couvent-témoin, les frères, aussi longtemps que vécut le Père, s’asseyaient à terre pour manger, se conformant ainsi à son exemple et à sa volonté.

[4] Allusion à l’épisode des disciples d’Emmaüs, Lc 24 23.

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