CHAPITRE 80
COMMENT LE SAINT MONTRA, PAR SON EXEMPLE, QU’IL CONDAMNAIT LA TROP GRANDE FAMILIARITÉ.
114. Saint François se rendait un jour à Bevagna. Il était épuisé par les jeûnes : les forces lui manquèrent en chemin. Le frère qui l’accompagnait envoya prévenir une pieuse femme et lui fit demander humblement du pain et du vin pour le saint. A cette nouvelle, la dame accourut aussitôt, accompagnée de sa fille, vierge consacrée à Dieu1 ; elles apportèrent tout ce qu’il fallait pour le réconforter. Après s’être restauré, le Père les nourrit à son tour de la Parole de Dieu. Mais tant que dura le sermon, il ne regarda ni l’une ni l’autre. Après leur départ, son compagnon lui dit : « Pourquoi n’as-tu même pas accordé un regard à cette vierge sainte qui venait à toi avec tant de dévotion ? Quel est donc celui, répondit le Père, qui ne doit craindre de lever les yeux sur une épouse du Christ ? Si les yeux et le visage donnent plus d’efficacité à un sermon, libre à elle de me regarder ; moi je ne le pouvais pas. »
Il revenait souvent sur le sujet ; il déclarait : « Parler à une femme relève de la frivolité sauf en confession ou pour deux mots d’exhortation, selon la coutume. Qu’est-ce qu’un frère Mineur peut donc bien avoir à traiter avec une femme, si ce n’est lorsqu’elle lui demande le sacrement de pénitence ou un conseil pour devenir meilleure2 ? »
1 Cette « vierge consacrée à Dieu » est probablement celle à qui saint François rendit la vue : 3 C 124.
2 Cf. 1 Reg 12 3.