LES GRANDEURS DE LA PAUVRETÉ
- « Voilà comment le fils du Père souverain se fit l’amant de ta beautéj. Te choisissant entre mille, c’est toi qu’il estimait devoir être sa plus fidèle compagne. Avant qu’il ne descendît de sa lumineuse patrie, c’est toi qui lui préparas un endroit convenable, un trône où s’asseoir, un lit où se reposer : la Vierge très pauvre, de laquelle il naquit. Dès sa naissance tu vins à lui fidèlement, pour qu’il trouve en toi son bonheur, et non dans le luxe. On le déposa dans une mangeoire, dit l’évangéliste, parce qu’il n’y avait pas de place à l’hôtelleriek. Et toujours, tu l’accompagnas ainsi sans relâche, tant qu’il fut sur terre, mêlé aux hommes l : les renards avaient leurs tanières, les oiseaux leurs nids, mais lui n’eut pas un lieu où reposer sa têtem. Quand il se mit à parler et à enseigner lui-même, après avoir laissé les prophètes parler en son nom, c’est de toi d’abord qu’il fit la louange : Bienheureux les pauvres en esprit, car le Royaume des cieux est à eux n !
- « Puis, lorsqu’il se choisit quelques amis comme témoins de sa prédication et de son séjour parmi les hommes pour le salut de l’humanité, il n’élut point de riches commerçants, mais de modestes pêcheurs, afin de montrer à tous combien l’estime qu’il te portait devait engendrer d’amour pour toi. Finalement, comme s’il fallait une preuve éclatante et définitive de ta valeur, de ta noblesse, de ton courage, de ta prééminence sur les autres vertus – qui sans toi ne peuvent se prétendre vertus – et de ta souveraineté céleste, étrangère à ce mondeo, tu fus la seule à rester attachée au Roi de gloire, alors que les amis qu’il s’était choisis l’avaient abandonné. Toi la si fidèle compagne, la tendre amante, tu ne le quittas pas un instant ; tu t’attachais même d’autant plus à lui que tu le voyais davantage et plus universellement méprisé.
- « Tu étais avec lui sous les clameurs des Juifs, sous les injures des pharisiens, sous les affronts des princes des prêtres, sous les soufflets, sous les crachats, sous les coups de fouet. Lui, qui méritait tous les respects, subissait tous les outrages. Et toi seule le consolais. Tu ne le quittas qu’il ne fût mort et mort en croixp, nu, les bras étendus, mains et pieds cloués ; jusque sur la croix tu subissais la torture avec lui, si bien qu’il ne lui restait plus rien à montrer de sa gloire que toi … Finalement, lorsqu’il monta au ciel, il te laissa le sceau du Roi des cieux pour en marquer les élus, afin que quiconque aspire au Royaume éternel vienne te trouver et te supplier de l’y introduire : car on ne peut y entrer que marqué de ton sceau.
- « Donc, notre Dame, aie de nous compassion, marque-nous du sceau de ta grâce. Qui serait assez sot, assez fou pour ne pas aimer de tout son cœur celle qui fut ainsi choisie et prédestinée par le Très-Haut ? Quel est celui qui te refuserait respect et honneurs quand le maître adoré de toutes les vertus du ciel t’a entourée de tant d’égards ? Quel est celui qui ne doive baiser les traces de tes pas, quand le maître de majesté s’inclina si humblement devant toi, se fit compagnon si amical et s’attacha si tendrement à toi ?
« Nous te supplions donc, notre Dame, par lui et à cause de lui, de ne pas repousser nos prières quand nous sommes dans le besoin, mais de nous délivrer du danger, toi qui es dans la gloire, éternellement heureuse »
j Sg 8 2.
k Lc 2 7.
m Mt 8 20.
n Mt 5 3.
o Jn 18 36.
p Ph 2 8.