BÉNÉDICTION À LA VILLE D’ASSISE
- Un jour que le bienheureux François était cloué au lit par la maladie dans le palais épiscopal d’Assise, un frère, homme spirituel et saint, lui dit, par manière de jeu et de plaisanterie : « Combien vendras-tu tes hardes au Seigneur ? Bientôt des baldaquins et des soieries précieuses couvriront ce corps revêtu maintenant de haillons. » Le saint portait alors, à cause de sa maladie, un bonnet de fourrure recouvert de bure, et une tunique grossière. Le bienheureux François, ou plutôt le Saint-Esprit parlant par sa bouche, répondit dans un grand élan joyeux : « Tu dis vrai, il en sera ainsi. »
- Pendant qu’il demeurait en ce palais, voyant que son mal empirait de jour en jour, il se fit porter en civière à Sainte-Marie de la Portioncule ; il n’aurait pu tenir à cheval à cause de l’aggravation de sa très cruelle maladie. Comme ceux qui le portaient passaient sur la route, à la hauteur de l’hôpital[1], il leur dit de poser la civière à terre, de façon que son visage fût tourné vers Assise. Il n’y voyait, en effet, pour ainsi dire plus, à cause de sa longue et grave maladie d’yeux. Alors il se redressa un peu et bénit la cité d’Assise en disant : « Seigneur, je crois que cette ville fut jadis le refuge et le séjour d’hommes méchants et injustes, mal famés dans tout le pays ; mais je vois aussi que, par ta bonté surabondante, au temps choisi par toi, tu as manifesté à cette ville les richesses de ton amour ; elle est devenue le séjour et l’habitation de ceux qui doivent te connaître, rendre gloire à ton nom et répandre dans tout le peuple chrétien le parfum d’une vie pure, d’une foi solide, et d’une bonne réputation. Je te prie donc, Seigneur Jésus-Christ, Père des miséricordes[2], de ne pas considérer notre ingratitude, mais de te rappeler l’amour infini que tu as témoigné à cette cité. Qu’elle reste toujours la demeure et l’habitation de ceux qui te connaîtront et glorifieront ton nom béni et glorieux dans les siècles des siècles. Amen. »
Cette prière achevée, on le porta à Sainte-Marie de la Portioncule.
[1] L’hôpital Saint-Sauveur, tenu par les Crucigères ou Croisiers. Il en reste encore quelques traces, encastrées dans les murs de la Casa Gualdi.
[2] 2 Co 1 3. qui applique cette expression au « Père de Notre Seigneur Jésus-Christ ».