Vita prima Chapitre 4 n° 97-98

Deuxième partie :

CHAPITRE 4

LA FERVEUR DU BIENHEUREUX FRANÇOIS. SA MALADIE D’YEUX.

97.- C’est vers la même période que son corps fut tourmenté de diverses maladies plus violentes qu’auparavant : rançon des mortifications qu’il s’imposait depuis de longues années pour réduire son corps en servitude. Depuis déjà plus de dix-huit ans il n’avait accordé à sa chair aucun repos ; dans les régions les plus diverses et les plus lointaines, il avait promené sa « chair » pour permettre à l’« esprit » qui en lui était prompt, généreux et fervent, de répandre partout le bon grain de la Parole de Dieu. Il avait empli toute la terre de l’Evangile du Christ, visitant parfois dans une même journée quatre ou cinq bourgs ou hameaux, annonçant dans chacun le royaume de Dieu, édifiant son auditoire tant par son exemple que par sa parole : c’était de sa personne tout entière qu’il prêchait . L’adhésion, l’obéissance de la chair à l’esprit étant en lui si parfaite qu’aux efforts déployés par celui-ci pour atteindre la sainteté, celle-là non seulement ne rechignait pas, mais tâchait même de la devancer, selon qu’il est écrit : « Yahweh, mon Dieu, mon âme a soif de toi ; après toi languit aussi ma chair  ! » Cet assujettissement continuel avait fini par rendre la soumission elle-même volontaire, et cette docilité de chaque jour lui avait préparé l’assise d’une vertu consommée : l’automatisme souvent passe dans le tempérament.

98.- Mais il est une loi inéluctable de la nature humaine : l’homme extérieur dépérit progressivement, cependant que l’homme intérieur se renouvelle sans cesse ; ainsi l’on vit se craqueler de toutes parts le vase très précieux où François cachait son trésor céleste, et ses forces l’abandonnèrent. Mais « quand l’homme a fini de chercher, il n’est encore qu’au début ; et quand il s’arrête, c’est alors que le travail commence  » ; son esprit devenait d’autant plus prompt que sa chair devenait plus faible : il voulait avec une telle force le salut des âmes, il désirait si intensément gagner à Dieu son prochain que, hors d’état de marcher, c’est à dos d’âne qu’il parcourait nant le pays.

Ses frères ne cessaient de lui conseiller, et de façon pressante, de recourir au médecin pour remettre autant que possible en état son pauvre corps à bout de forces ; ils lui disaient que c’était un devoir… Mais son esprit généreux n’avait d’autre but que le ciel, il ne désirait que la libération pour être réuni au Christ et il refusait de se laisser soigner. Comme il n’avait pas encore accompli tout ce qui manquait dans sa chair à la Passion du Christ dont il portait pourtant les stigmates dans son corps, il contracta une très grave maladie. Le mal gagnait et s’aggravait de jour en jour, faute de soins ; finalement frère Elie intervint : François se l’était choisi pour « mère  » et l’avait institué « père » de tous les autres frères  ; Elie l’obligea à ne pas repousser plus longtemps les secours de la médecine, mais à les accepter au nom du Fils de Dieu qui les créa : « Le Seigneur fait produire à la terre ses médicaments ; l’homme sensé ne les dédaigne pas  ». Le Père saint consentit de bonne grâce ; il se soumit à ses instructions avec humilité.

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