UBERTIN DE CASALE

Frère mineur franciscain, Ubertin de Casale fut l’une des principales figures du parti des Spirituels, fortement influencé par les écrits de Joachim de Flore et auteur d’un ouvrage qui a inspiré la piété médiévale et la dévotion à la passion du Christ : Arbor Vitae Cruxificae Jesu.

 Ubertin de Casale
frère mineur,
né vers 1259, Casale (Italie)
décédé vers 1330

Sa Vie 

Sa vie ne nous est connue que partiellement, à travers les notices autobiographiques de l’Arbor Vitae. Il est né en 1259, à Casale, dans le diocèse de Verceil en Piémont. On pense qu’il rentra très jeune chez les Frères mineurs de cette cité, vers 1273. Il appartenait alors à la Province de Gênes. Il débuta ses études cléricales en cette province. Il se reprocha, par la suite, d’avoir détourné son esprit vers la vaine science au lieu de s’adonner à la contemplation. Mais ses premières années de vie religieuse furent marquées par une adhésion très forte à la personne de Jésus et à la méditation des récits évangéliques.

Vers 1285, il est envoyé en Toscane pour étudier la théologie. Il s’y rend après un détour par Rome et par les sanctuaires franciscains d’Assise et d’Ombrie. Quelques rencontres vont orienter sa vie : à Greccio, le Bienheureux Jean de Parme, ancien ministre général lui communique son admiration pour Joachim de Flore et sa vision de l’histoire de l’Église et de la place des Ordres mendiants dans la préparation de la fin des temps. Il l’informe sur l’Indulgence de la Portioncule et il le convainc de demeurer dans la mouvance des Spirituels. À Cortone il s’entretient avec Marguerite de Cortone, la pénitente. À Assise il vit intensément son pèlerinage à Sainte-Marie-des-Anges. Enfin, au studium de Santa Croce de Florence il va faire la rencontre décisive de sa vie et de ses futurs combats, en suivant l’enseignement de Pierre de Jean Olivi (Pierre Jean Olieu) le théologie de référence de tous les spirituels. Cependant, en 1282, le chapitre général de Strasbourg condamnait l’enseignement de Pierre de Jean Olivi, dont 34 propositions furent jugées proches d’hérésie.

En 1289, Ubertin est envoyé au Studium general de Paris pour y conquérir ses grades. On ignore si il y enseigna lui-même. Durant cette période le groupe des Spirituels fait l’objet de suspicions constantes, de la part des papes Boniface VIII, Benoît XI, Clément Vet Jean XXII, hostiles aux idées d’Olivi. On retrouve Ubertin en Italie en 1298, où la rencontre avec bse Angèle de Foligno, la mystique franciscaine, fut pour lui une grande grâce de conversion : « Tout homme au jugement sain qui m’avait connu avant cette rencontre, ne pouvait douter que l’esprit du Christ ne fut à nouveau engendré en moi… »(Arbor vitae). Il est désormais totalement voué à la cause des Spirituels et aux adeptes de l’Observance la plus rigoureuse de la Règle franciscaine. De 1298 à 1302, il enseigne à son tour au couvent de Florence. Mais en 1302, il abandonne définitivement l’enseignement, et la vaine science, pour se consacrer à la prédication et à la promotion de la cause des Spirituels.

Ubertin de Casale et les Spirituels 

Il est certain qu’Ubertin fut un prédicateur estimé et même très populaire. D’une part en raison de sa fougue et de son enthousiasme pour annoncer l’Evangile de Jésus-Christ, mais aussi parce qu’il dénonçait, sans ménagement, la situation de l’Église de son temps et ce qu’il estimait être des déviations de l’idéal de François d’Assise. Cependant il prit soin de se démarquer des prédicateurs populaires qui répandaient les thèses des Frères du Libre-Esprit, le parti des Fraticelles, branche radicale de la mouvance spirituelle qui préconisait la liberté du chrétien devant les préceptes moraux, le retour à la nature originelle, l’amour libre, le refus de toute propriété, et qui dénonçaient avec vigueur les richesses de l’Église et son statut hiérarchique. L’Inquisition pourchassait ces déviants, et les spirituels « modérés » les redoutaient, car ils déconsidéraient leur cause. On pense qu’Ubertin dût interrompre ses prédications en raison de ses sympathies avec les Spirituels, de ses attaques contre le clergé séculier et de ses critiques contre le Pape Boniface VIII. Après la mort de Boniface VIII, Benoît XI tenta d’apaiser les querelles dans l’Ordre franciscain. Ubertin se rendit à Rome pour défendre les Spirituels et l’œuvre d’Olivi. Mais Ubertin ne fut pas moins critique envers ce Pape. Cela lui valut d’être assigné ‘en retraite’ au couvent du Mont Alverne, où, à la demande des frères du couvent, il composa la première version de l’Arbor Vitae. C’est une œuvre foisonnante, à la fois traité de vie spirituelle, commentaire de la vie et de la passion de Jésus, interprétation de l’histoire présente de l’Église et de son avenir eschatologique.

En 1305, Ubertin publiait l’œuvre de sa vie, l’Arbor Vitae Crucifixae Jesu, dans lequel il oppose l’Église charnelle, empêtrée dans ses richesses et ses ambitions, à l’Église spirituelle, représentée par ceux qui pratiquent l’Évangile de la pauvreté, comme les Frères Mineurs spirituels. Ubertin remania continuellement ce livre jusqu’à la rédaction finale de 1329. Le livre connût un succès considérable.

En 1309, Ubertin se rend en Avignon, pour plaider la cause des Spirituels auprès du pape Clément V. Il rédige plusieurs libelles de défense de la cause des adeptes de la pauvreté évangélique. Mais la conciliation échoue. Le pape Jean XXII va aggraver les querelles en prenant le parti de la Communauté et en soutenant que le Christ n’a pas été totalement pauvre. Cette affirmation scandalise les frères, surtout lorsque Jean XXII déclare hérétiques ceux qui soutiennent l’absolue pauvreté du Christ. En 1321 il lance une répression contre les Fraticelles auxquels il assimile bientôt les Spirituels. Auparavant, le Pape avait poussé Ubertin à rentrer dans le monastère bénédictin de Gembloux, mais le franciscain désirait demeurer au sein de l’Ordre. Au chapitre général de Pérouse, en 1322, le ministre général Michel de Césène qui soutenait l’absolue pauvreté du Christ, est contraint de démissionner et se réfugie auprès de l’empereur Louis de Bavière. La bulle Cum inter nonnulos du 12 novembre 1323 comdamnait comme hérétiques les partisans de l’absolue pauvreté. À son tour, Ubertin fut accusé d’hérésie, en 1325 et alla rejoindre Michel de Césène auprès de Louis de Bavière qui avait été excommunié en 1324 et traitait maintenant le Pape de pontife illégitime. En 1328, il accompagne Louis de Bavière à Rome et y prononce une violente diatribe contre le Pape. Ensuite, on perd la trace d’Ubertin et l’on ignore le lieu et la date exacte de sa mort.

Son œuvre 

Son œuvre principale est l’Arbor vitae crucifixae Jesu en deux rédactions, dont on possède de nombreux manuscrits en différentes villes d’Europe.

La première rédaction fut imprimée par A. De Bonetis, à Venise en 1485 (incunable). Cf. Ubertinus de Casali, Arbor vitae…with an Introduction and Bibliography by Charles T. Davis. (reproduction anastatique de l’incunable de 1485 , Turin 1961.)

D’autres œuvres sont inédites comme : De altissima paupertate Christi et apostolorum eius et virorum apostolicorum ; Des Sermons sur la Pâque, le Samedi-saint, la consécration d’une église, le dimanche de la septuagésime, etc…

Quelques traités ont été publiés en latin, en diverses revues, en particulier ses textes d’apologie de sa pensée sur la pauvreté, devant le Concile de Vienne.

Cf FRANCISCAN AUTHORS… < http://users.bart.nl/~roestb/franciscan/ >

Bibliographie 

  • Frédégand Gallaey, ofm.cap., Étude sur Ubertin de Casale, l’Idéalisme franciscain spirituel au XIV°s. , Paris 1911
  • Ch. Davis, Le Pape Jean XXII et les Spirituels. Ubertin de Casale, en Franciscains d’Oc, les Spirituels, 1280-1324. Cahiers de Fanjeaux, 10 (1975), 263-283
  • Carlos M. Martinez Ruiz, De la Dramatizacion de los Acontecimientos de la Pascua a la Christologia ; el cuarto libro del Arbor vitae…de Ubertino de Casale. Roma (ed. Antonianum) 2000

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