ANGÈLE DE FOLIGNO

Angèle de Foligno :1248-1309

Veuve, pénitente, tertiaire de saint François, mystique du XIIIe. s.

Angèle de Foligno ne nous est connue qu’à travers son œuvre (le Livre des visions et des instructions) et dans un texte d’Ubertin de Casale qui la rencontra à Foligno et lui consacra une page de son Arbor vitae.

Angèle est née à Foligno, en Ombrie, en 1248, dans une famille riche. Mariée très jeune elle eut plusieurs enfants. Mais selon ses dires, elle mena une vie assez dissolue : aimant le monde et le luxe et « oubliant ses devoirs d’épouse et de mère ». Toutefois, elle désirait vivement se convertir et se détourner de ses fautes, mais sans en avoir le courage. Peu à peu elle changea de vie et se confessa, sans cependant oser avouer toutes ses fautes. En s’approchant de l’Eucharistie, elle fut saisie par la crainte du sacrilège et la peur de la damnation. Elle invoqua saint François d’Assise qui lui apparut durant son sommeil et lui conseilla une nouvelle confession qu’elle fit à un frère mineur, confesseur de l’évêque. Peu de temps après cette première conversion, vers 1288, elle perdit sa mère, puis son mari et peu après ses enfants. Elle voulut alors renoncer au monde et s’engagea dans le Tiers-Ordre de saint François, puis se mit sous la direction spirituelle d’un frère franciscain, Frère Arnold. Elle fut favorisée de visions de la Passion de Jésus-Christ, qu’elle confrontait avec le souvenir de ses fautes et la révélation de la miséricorde de Dieu. Son confesseur, prenant connaissance des faveurs mystiques, des apparitions et des extases d’Angèle, lui ordonna de lui faire le récit circonstancié de ses révélations. C’est donc ce frère qui écrivit le Livre des visions et des instructions d’Angèle. Sa renommée se répandit, surtout parmi les fidèles dévôts de saint François d’Assise, et plusieurs femmes la rejoignirent pour l’aider dans ses œuvres de charité et former une petite communauté de tertiaires de saint François.. Il semble que les frères de la mouvance spirituelle se soient appuyés sur sa renommée. Angèle mourut à Foligno en 1309 et fut enterrée dans l’église saint François de cette ville. On lui attribua très vite des miracles et son corps est toujours vénéré, à Foligno. Le Pape Innocent XII approuva son culte , et le pape Clément XI la déclara bienheureuse, le 11 juillet 1701. Le Pape François la déclara ‘sainte’, par une procédure exceptionnelle, en 2013.

La bienheureuse Angèle est considérée comme une des grandes mystiques du Moyen Age et son livre est regardé comme un chef d’œuvre. En voici un extrait, juste pour goûter et qui inspira Bernanos dans un échange du « Dialogue des Carmélites » :

« Une autre fois, c’était le quatrième jour de la semaine sainte, j’étais plongée dans une méditation sur la mort du Fils de Dieu, et je méditais avec douleur, et je m’efforçais de faire le vide dans mon âme, pour la saisir et la tenir tout entière recueillie dans la Passion et dans la mort du Fils de Dieu, et j’étais abîmée tout entière dans le désir de trouver la puissance de faire le vide, et de méditer plus efficacement.

Alors cette parole me fut dite dans l’âme : «Ce n’est pas pour rire que je t’ai aimée.»

Cette parole me porta dans l’âme un. coup mortel, et je ne sais comment je ne mourus pas ; car mes yeux s’ouvrirent, et je vis dans la lumière de quelle vérité cette parole était vraie. Je voyais les actes, les effets réels de cet amour, jusqu’où en vérité il avait conduit le Fils de Dieu. Je vis ce qu’il supporta dans sa vie et dans sa mort pour l’amour de moi, par la vertu (128) réelle de cet amour indicible qui lui brûlait les entrailles, et je sentais dans son inouïe vérité la parole que j’avais entendue ; non, non, il ne m’avait pas aimée pour rire, mais d’un amour épouvantablement sérieux, vrai, profond, parfait, et qui était dans les entrailles.

Et alors mon amour à moi, mon amour pour lui, m’apparut comme une mauvaise plaisanterie, comme un mensonge abominable. Ici ma douleur devint intolérable, et je m’attendis à mourir sur place.

Et d’autres paroles vinrent, qui augmentèrent ma souffrance : « Ce n’est pas pour rire que je t’ai aimée ; ce n’est pas par grimace que je me suis fait ton serviteur ; ce n’est pas de loin que je t’ai touchée ! »

Ma douleur, déjà mortelle, allait toujours en augmentant, et je criais :

«Eh bien ! moi, c’est tout le contraire. Mon amour n’a été que plaisanterie, mensonge, affectation. Je n’ai jamais voulu approcher de vous, en vérité, pour partager les travaux que vous avez soufferts pour moi, et que vous avez voulu souffrir ; je ne vous ai jamais servi dans la vérité et dans la perfection, mais dans la négligence et dans la duplicité.

Lorsque je vis ces choses, lorsque, je vis de mes yeux la vérité de son amour et les signes (129) de cette vérité, comment il s’était livré tout entier et totalement à mon service, comment il’ s’était approché de moi, comment il s’était vraiment fait homme pour porter et sentir en vérité mes douleurs ; quand je vis en moi tout le contraire absolument, je crus mourir de douleur. Il me semblait que ma poitrine allait se disjoindre et mon coeur éclater. Et comme j’étais occupée spécialement de cette parole : « Ce n’est pas de loin que je t’ai touchée », il en ajouta une autre, et j’entendis qu’il disait:

« Je suis plus intime à ton âme qu’elle-même.»

Le Livres des Visions et des Instructions, chapitre 33 :

L’Amour vrai, l’amour menteur.

Cependant, quelques historiens modernes considèrent que ce livre pourrait bien être l’œuvre anonyme d’un cercle de franciscains spirituels s’appuyant sur la réputation de visionnaire et de mystique qu’avait la bienheureuse.

Bibliographie

Le Livre des visions et instructions de la bienheureuse Angèle de Foligno, (1873). Traduit par Ernest Hello   Texte intégral [archive

Le Livre de la bienheureuse soeur Angèle de Foligno, du Tiers-Ordre de saint François, par P. Paul Doncoeur , Paris (1926), Librairie de l’Art catholique.

Anonyme, Le Livre d’Angèle de Foligno 1285-1298, Texte traduit du latin par Jean-François Godet – présenté par Paul Lachance et Thaddée Matura, 304 p.,Coll. Atopia, Grenoble, Éditions Jérôme Millon, 1995, N° ISBN 2-84137-026-7

René-Charles Dhont – Une éblouissante ascension mystique. Angèle de Foligno– Monastère des Clarisses, Paray Le Monial 1992;

Ivan Gobry, Angèle de Foligno, docteur de la vie mystique, Paris (1998).

Michel Cazenave, Angèle de Foligno, Paris (2007),Albin Michel.

Voir aussi :

< http://missel.free.fr/Sanctoral/01/04.php >

Texte du Livre des visions : < http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/angele/index.htm >

Jacques Dalarun , Angèle de Foligno a-t-elle existé ?

 

Les commentaires sont fermés