LÉGENDE DE PÉROUSE 37-38

MÉDITATION DÉ LA PASSION ET DE L’HUMILITE DU CHRIST

  1. Le bienheureux François souffrit pendant longtemps, et jusqu’à sa mort, du foie, de la rate et de l’estomac. De plus, au cours du voyage qu’il fit outremer pour prêcher au Sultan de Babylone et d’Egypte, il avait contracté une très grave maladie d’yeux causée par la fatigue et surtout par l’excessive chaleur qu’il eut à supporter à l’aller et au retour. Mais si ardent était l’amour qui emplissait son âme depuis sa conversion au Christ, que, malgré les prières de ses frères et de beaucoup d’autres hommes émus de compassion et de pitié, il ne se mettait pas en peine de soigner ces maux.

 Chaque jour il méditait l’humilité et les exemples du Fils de Dieu ; il en éprouvait à la fois beaucoup de compassion et beaucoup de douceur, et finalement ce qui était amer pour son corps se changeait en douceur[1]. Les souffrances et les amertumes endurées pour nous par le Christ lui étaient un perpétuel sujet d’affliction et une cause de mortification intérieure et extérieure ; aussi n’avait-il nul souci de ses propres souffrances.

 Un jour, c’était peu d’années après sa conversion, il suivait seul la route qui passe prés de Sainte-Marie de la Portioncule et, tout en marchant, se lamentait et gémissait à haute voix. Un homme spirituel, que nous connaissons bien et qui nous a rapporté le fait, le rencontra alors. Cet homme avait témoigné au saint beaucoup de bonté et l’avait consolé avant qu’il eût un seul frère, comme il continua d’ailleurs de le faire par la suite. Il lui dit : « Qu’as-tu donc, frère ? » Il pensait en effet qu’il souffrait de quelque infirmité. Le bienheureux répondit : « Je devrais parcourir le monde entier, pleurant et gémissant ainsi sans fausse honte sur la Passion de mon Seigneur ! » Et cet homme se mit à gémir avec lui et à verser d’abondantes larmes.

  1. Pendant sa maladie d’yeux, il endurait de telles souffrances qu’un jour un Ministre lui dit :
    « Frère, pourquoi ne te fais-tu pas lire par ton compagnon quelque passage des Prophètes ou d’autres chapitres des Ecritures ? Ton âme exulterait dans le Seigneur et recevrait ainsi une immense consolation. » Il savait en effet que le bienheureux ressentait beaucoup de joie dans le Seigneur quand on lui lisait les divines Ecritures. Mais il répondit : « Frère, je trouve chaque jour une telle douceur et consolation dans le souvenir et la méditation de l’humilité manifestée ici-bas par le Fils de Dieu, que je pourrais vivre jusqu’à la fin du monde sans qu’il me soit nécessaire d’entendre lire ou de méditer d’autres passages des Ecritures. » Il se répétait souvent et redisait aux frères ce verset de David : Mon âme a refusé d’être consolée[2]. C’est pourquoi, voulant être, comme il le disait fréquemment, l’exemple et le modèle de tous les frères, il refusait non seulement les médicaments, mais encore la nourriture qui lui eût été nécessaire dans ses maladies. C’est pour rester fidèle à ce programme qu’il était dur à son corps, soit quand il paraissait bien portant (encore qu’il fût toujours frêle et vulnérable), soit même au cours de ses maladies.

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[1] Cf. Test. 3

[2] Ps 76 3.

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